Les gammes à deux doigts: suite et fin.

Vous avez ou recherchez des informations sur la pédagogie, c'est ici!
Avatar du membre
Pierre LAGOUTTE
Messages :79
Enregistré le :mar. févr. 03, 2004 10:29 am
Localisation :Mâcon
Les gammes à deux doigts: suite et fin.

Message par Pierre LAGOUTTE » dim. janv. 29, 2006 3:18 pm




Dans mon étude précédente ENSEIGNER N'EST PAS JOUER, j'ai analysé le travail des doigts actifs: index, majeur et pouce, mais une question annexe se pose: que font pendant cette évolution les deux derniers doigts de la main, non actifs ? Pour donner une réponse précise à cette question, il faut revenir à la structure de la main telle qu'elle est définie dans l'Encyclopédie médico-chirurgicale, mais dans bien d'autres traités d'anatomie-physiologie. Les phalanges des deux premiers doigts et du pouce constituent la zone "de mobilité et d'adresse", de la main, tandis que les deux derniers doigts, avec les muscles hypothénariens, constituent la "pince-étau", la "zone de force". J'ai déjà montré ceci dans diverses études. Je dois ajouter que ces deux zones distinctes travaillent le plus souvent en sens inverse l'une de l'autre. C'est le sujet de mon additif d'aujourd'hui.

- On tient la queue d'une tasse de thé avec la dernière phalange des deux premiers doigts et du pouce (zone des mouvements fins) fléchies les unes contre les autres. Pendant cette tenue, les deux derniers doigts s'ouvrent, surtout le petit doigt, ce qui est parfois signe d'un
geste affecté, que j'appelle "prendre le thé chez
madame la comtesse !" Il en est de même lorsqu'on tient une épingle. Ce travail inverse des doigts est spontané.

- A l'inverse, lorsqu'on tient un briquet serré entre les deux derniers doigts fléchis contre la paume (on tient souvent un archet de violoncelle de cette façon lorsqu'on le manipule dans l'espace, geste spontané), les deux premiers doigts et le pouce peuvent s'ouvrir librement; ils s'allongent.

On retrouve cette inversion du travail des deux zones de la main dans l'exécution des gammes à deux doigts.

En effet, l'index et le majeur travaillent en résistance à une extension. Ils subissent un effort d'allongement, mais ils resteront dans leur course de flexion des phalanges. Il en résulte que les deux derniers doigts seront entraînés dans une couse d'extension; ils s'ouvriront plus ou moins.

Dans cette opposition de mouvement entre les deux zones motrices de la main, l'essentiel est que la ligne qui joint les têtes des métacarpiens reste stable dans sa forme car c'est elle qui agit comme une sorte de charnière pour l'ensemble des quatre doigts. Elle constitue l'une des deux "voûtes" de la main.

Je précise, en insistant, sur le fait que ce comportement des deux zones de la main est caractéristique du JEU BAS, jeu très lent et "de pesanteur", bras abandonné à la gravité, jeu enccore appelé jeu en étirement.

Il est bien entendu que lorsqu'on accélère l'exéccution de ces gammes à deux octaves sur chaque corde avec les deux premiers doigts, l'opposition de tendance entre la flexion des premiers et l'extension des deux derniers s'efface progressivement. On passe progressivement au JEU HAUT. Les doigts actifs se mettent à "courir" le long de la corde avec des mouvements de plus en plus rapides et d'amplitude. de plus en plus réduite. Les percussions deviennent la règle. C'est en ce sens que Casals avait dit : "la main gauche du violoncelliste est une main de pianiste". Observez en effet un pianiste qui joue une gamme chromatique avec les premiers doigts de la main et le pouce.
Vous aurez cette image présente à l'esprit.
Pierre Lagoutte, chercheur en biomécanique appliquée au geste instrumental, tous instruments confondus.