ENSEIGNER N'EST PAS JOUER
- Pierre LAGOUTTE
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Pierre Lagoutte
Conseiller pédagogique honoraire en Education musicale
Violoniste, altiste, violoncelliste
Témoignages qui émanent de musiciens - interprètes et pédagogues.
- De J.J. Quantz, auteur du célèbtre traité d'enseignement de la flûte traversière
"Le fait de trop compter sur le talent est un grand obstacle pour la réflexion pédagogique. L'expérience montre que nous rencontrons davantage de personnes ignorantes des choses de l'enseignement chez ceux qui possèdent un don naturel pour l'apprentissage que chez ceux, de de talent plus quelconque, mais qui ont progressé par recherche et par réflexion".
(Ouvrage publié en français à Berlin en 1752)
- Extrait du "Monde de la Musique", numéro de janvier 1996
"Souvent, les bons professeurs sont des interprètes médiocres, et les interprètes qui ont du succès sont peu doués pour l'enseignement. L'ennui, c'est qu'on demande souvent à des interprètes célèbres d'enseigner, sans se préoccuper de leurs aptitudes pédagogiques... (extrait d'une conversation avec le pianiste Evgeni Svetlanov).
- De la revue "La Lettre du Musicien"
"Il est temps que l'enseignement tout entier renonce à un élitisme mal compris, qui n'est plus de mise...
... Il faut bien reconnaître que si les choses changent lentement dans nos écoles de musique, ce n'est pas seulement parce que l'argent manque... On se heurte parfois à un corps enseignant qui se contente de répèter ce qu'on lui a appris sans aucune innovation pédagogique".
- Extrait d'une revue (titre oublié)
"Il est normal que le virtuose n'ait pas accès aux conditions qui commandent ses performances. Les gestes qu'il exécute lui paraissent aussi naturels que le fait de marcher et il n'imagine pas qu'il puisse exister d'autre équilibre que celui qui est le sien. On connaît l'anecdote de Sarasate, à qui on demandait comment il faisait pour obtenir la sonorité qui était la sienne: "Comme ça!" répondait-il en tirant son archet".
- Et cette réponse de Rostropovich, à qui la violoncelliste Maria Kliegel demandait comment on tient un archet de violoncelle : "Oh, l'archet ? Tenez-le avec votre pied si vous voulez, pourvu que ça marche !".
Continuons avec un témoignage trouvé dans le compte-rendu du Congrès de la F.N.A.P.E.C. de 1998: "On cite le cas du fils d'un violoncelliste. L'enfant apprenait le violon et son père voulait lui faire tenir l'archet comme pour le violoncelle, en contradiction avec son professeur ! Et pourtant, son père était directeur de conservatoire !".
... Et avec cet extrait du célèbre "Essai sur le doigté du violoncelle" de Duport: (il s'agit de l'exécution du staccato)
"Tout le monde connaît ce coup d'archet; je ne crois pas nécessaire de démontrer comment on l'exécute. C'est absolument une affaire de tact et d'adresse. On y parvient en s'exerçant beaucoup. Il y a des personnes qui le saisissent tout de suite; d'autres ne parviennent jamais à le faire parfaitement". Et Duport ajoute, avec une sincérité et une modestie qui l'honorent : "Je suis de ce nombre".
Continuons avec la Britannique Kato Havas, par un extrait de son livre "Freedom to Play" (dans notre traduction française) :
Il s'agit du paragraphe intitulé "Le Professeur vedette et le Professeur obscur", et du paragraphe "L'enseignement peut-il être dangereux ?".
Nous renvoyons le lecteur à ces textes.
Extrait du Bulletin syndical des Artistes musiciens de Paris et de la région parisienne (1er et 2ème trimestres 1995).
Le titre de l'article, suivi des statistiques, est le suivant : "Les résultats des concours de professeurs : c'est mauvais !"
Ceci nous amène à parler des établissements qui dispensent une formation pédagogique aux futurs professeurs. Il y a les classes préparatoires au C.A. des deux grands conservatoires nationaux : Paris et Lyon, et les CEFEDEM (un par région). Il existe quelques autres établissements de formation. Le nombre de places y est très inférieur au nombre de candidatures. On devine la conséquence à en tirer.
A titre de conclusion de cette partie consacrée aux témoignages de musiciens, citons un passage extrait de l'ouvrage "New Directions in Cello Playing" du professeur Victor Sazer.
L'auteur rapporte au début de son livre :
"J'ai eu des moments de désarroi pendant le temps de mes études, lorsque le passage d'un professeur à l'autre m'a obligé à m'adapter à une nouvelle école ou à une nouvelle façon de jouer. Chaque professeur semblait avoir des conceptions différentes au sujet du jeu du violoncelle, et leurs conseils étaient souvent contradictoires... Et ceci à unpoint que je commençais à m'émerveiller que l'on puisse définir la meilleure façon de faire les choses selon des principes ou des critères objectifs." (notre traduction française, voir le chapitre entier dans son texte anglais).
Fin de la première partie de mon étude.
Vos témoignages sur le sujet sont les bienvenus.
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Que tout ceci est vrai, la plupart du temps! Mais pas uniquement dans le domaine musical. Toutes les matières enseignées sont souvent la proie de nombreux professeurs qui se sentent maîtres en leur domaine, passionnés peut-être, je l'espère, mais qui n'ont, en général connu que leur matière et n'ont pas eu la possibilité ou le temps( je suis faux-cul sur ce coup) pour s'ouvrir l'esprit vers d'autres domaines.
C'est vrai que c'est passionnant de croiser la route d'un professionnel en la matière; effectivement ce n'est pas forcément un prof en la matière!
Mais ne jetons la pierre à personne, c'est humain de se sentir convaincu d'une mission.
Toutefois, je voulais préciser qu'en tant qu'élève très débutante de violoncelle, je n'ai pas eu cette perception à l'égard de mon professeur.
Mais il est vrai qu' en tant que débutante assoiffée de connaissances musicales et instrumentales ( j'ai 38 ans, je précise), il n'est pas facile de se sentir prête à être intégrée (c'est à la mode, il parait), dans un univers fascinant mais distant, discret, peu "conversant".( bref pas ouvert)
Je n'ai aucun scrupule personnel, je me suis inscrite dans une école de musique de province, je suis ancienne étudiante de fac toujours étudiante dans mon esprit, et je pense que la motivation personnelle est la première arme contre ce bouclier qu'est cette réputation de domaine élitiste.
C'est vrai que les plus grands virtuoses ne sont pas forcément les meilleurs prof, mais c'est à l'administration de ces écoles de musique ou de ces conservatoires de vouloir et avoir envie, surtout, d'ouvrir ses portes...
Communiquer VERS l'extérieur, semble être la seule méthode pour montrer aux non avertis que l'univers de la MUSIQUE, si merveilleux et prometteur, a un rôle majeur dans notre société: c'est un univers d'échange, me semble-t-il!!!!!!, de faire savoir et faire apprécier!
Si vous êtes passionnés, alors vous devez forcément avoir envie de partager votre passion, sinon, jouez tout seul!
Désolée pour ce message si long mais merci à l'auteur du sujet de me permettre de me rassurer: je sais que je ne suis pas seule sur cette planète.
Vive la musique
C'est vrai que c'est passionnant de croiser la route d'un professionnel en la matière; effectivement ce n'est pas forcément un prof en la matière!
Mais ne jetons la pierre à personne, c'est humain de se sentir convaincu d'une mission.
Toutefois, je voulais préciser qu'en tant qu'élève très débutante de violoncelle, je n'ai pas eu cette perception à l'égard de mon professeur.
Mais il est vrai qu' en tant que débutante assoiffée de connaissances musicales et instrumentales ( j'ai 38 ans, je précise), il n'est pas facile de se sentir prête à être intégrée (c'est à la mode, il parait), dans un univers fascinant mais distant, discret, peu "conversant".( bref pas ouvert)
Je n'ai aucun scrupule personnel, je me suis inscrite dans une école de musique de province, je suis ancienne étudiante de fac toujours étudiante dans mon esprit, et je pense que la motivation personnelle est la première arme contre ce bouclier qu'est cette réputation de domaine élitiste.
C'est vrai que les plus grands virtuoses ne sont pas forcément les meilleurs prof, mais c'est à l'administration de ces écoles de musique ou de ces conservatoires de vouloir et avoir envie, surtout, d'ouvrir ses portes...
Communiquer VERS l'extérieur, semble être la seule méthode pour montrer aux non avertis que l'univers de la MUSIQUE, si merveilleux et prometteur, a un rôle majeur dans notre société: c'est un univers d'échange, me semble-t-il!!!!!!, de faire savoir et faire apprécier!
Si vous êtes passionnés, alors vous devez forcément avoir envie de partager votre passion, sinon, jouez tout seul!
Désolée pour ce message si long mais merci à l'auteur du sujet de me permettre de me rassurer: je sais que je ne suis pas seule sur cette planète.
Vive la musique
- JBap
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Je rajouerai simplement ceci : en temps qu'eleve, je trouve important d'avoir un prof dont on aime le jeu, et que l'on peut apprecier en concert. Ca nous prouve, d'une certaine maniere, que ce qu'il enseigne donne de bons resultats...
Bon, ceci dit, je suis actuellement en echange a Cleveland, USA, et mon prefosseur est Richard Aaron. Inconnu ds nos contrees, un des professeurs les plus respectes et connus ici ! Les grandes universites se l'arrachent. A juste titre. Pourtant, il joue mal !
C'est une grande difference entre l'europe et les usa : la plupart des grands profs ne sont pas de grands concertistes en Amerique, alors qu'au cnsm de paris par exemple, ce sont presque tous des solistes ou des musiciens d'orchestres de haut niveau.
Est-ce bon ou mauvais ? Je n'en c rien... je peux juste emettre un avis, le mien, et si je trouve important d'aimer ecouter son prof en concert, cet echange m'a prouve que ce n'etait pas indispensable.
Bon, ceci dit, je suis actuellement en echange a Cleveland, USA, et mon prefosseur est Richard Aaron. Inconnu ds nos contrees, un des professeurs les plus respectes et connus ici ! Les grandes universites se l'arrachent. A juste titre. Pourtant, il joue mal !
C'est une grande difference entre l'europe et les usa : la plupart des grands profs ne sont pas de grands concertistes en Amerique, alors qu'au cnsm de paris par exemple, ce sont presque tous des solistes ou des musiciens d'orchestres de haut niveau.
Est-ce bon ou mauvais ? Je n'en c rien... je peux juste emettre un avis, le mien, et si je trouve important d'aimer ecouter son prof en concert, cet echange m'a prouve que ce n'etait pas indispensable.
- Jérémy
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Je crois aussi que ça dépend du niveau d'études: un débutant aura besoin d'un excellent pédagogue, tandis qu'un élève avancé aura plutot besoin d'un bon interprète...
Il existe des profs qui ont les deux qualités, mais c'est rare...
Il existe des profs qui ont les deux qualités, mais c'est rare...
"Si tous les cons étaient des sandwiches, on aurait largement résolu le problème de la faim dans le monde"
- Pierre LAGOUTTE
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ENSEIGNER N'EST PAS JOUER Seconde partie.
Tout d'abord, merci à Noctambule, JBap et Jeremy pour leur réponse rapide et circonstanciée à ma première étude.
Comme le remarque Noctambule, "Ceci est vrai, la plupart du temps, mais pas uniquement dans le domaine musical".
Ceci introduira ma seconde partie sur le sujet.
Commençons par une citation empruntée à Moshe Feldenkrais,
l'auteur de l'ouvrage "La Conscience du Corps":
"Agir ne signifie pas savoir". Qu'un individu fasse quelque chose ne prouve pas qu'il sache, même superficiellement ce qu'il fait ou comment il le fait... Les actes les plus simples et les plus habituels - comme se lever de sa chaise - peuvent rester une énigme pour celui qui n'a pas la moindre idée de la façon dont il l'accomplit".
Et de Piaget "Les opérations mentales deviennent invisibles à ceux qui les maîtrisent."
Voici donc maintenant des témoignages de sportifs de haut niveau: de A. Rivet, ancien entraîneur du Grenoble Université Athlétisme, devenu ensuite professeur à l'Institut National des Sports (Propos recueilli dans l'ouvrage "Savoir skier" de J. Joubert et J. Vuarnet):
"S'il est vrai que l'entraineur sportif est souvent "empirique" ou "instinctif", il est non moins vrai, particulièrement dans les spécialités dites "techniques", qu'une vision claire du geste à accomplir et la connaissance de certaines lois fondamentales éviteront des erreurs et des hésitations. La connaissance est en outre, dans ce domaine comme dans beaucoup d'autres, le support de l'intuition".
Dans le même ouvrage, des mêmes auteurs, on trouve encore: "L'analyse des mécanismes musculaires des mouvements du skieur est importante pour la pédagogie. Elle permet d'acquérir une vision globale du mouvement plus claire. Elle lui permet aussi de la transmettre plus facilement à l'élève. L'élève qui a compris le mécanisme d'un geste se "l'imagine" et le "sent" plus facilement. Il réussit plus vite à l'exécuter. L'analyse permet également de mettre en relief certains défauts qui pourraient paraître anodins. Il arrive aussi qu'elle permette de découvrir des exercices nouveaux qui conduisent au mouvement. Pour comprendre le mécanisme des gestes sportifs, il est nécessaire de connaître certaines règles fondamentales de la mécanique musculaire. (Fin de citation).
Autre témoignage emprunté au domaine de l'aéronautique:
(Vu et entendu à la télévision le 4 novembre 1997). C'est le directeur d'un centre de formation des instructeurs d'aéro-clubs qui parle: "Au cours des stages de formation de ces instructeurs, nous avons observé qu''il existe d'excellents pilotes qui font de bons instructeurs, mais aussi d'excellents pilotes qui ne savent pas expliquer et se faire comprendre. Par contre, nous voyons souvent des pilotes très moyens qui sont de bons enseignants car ils savent bien se faire comprendre et s'adresser à leurs élèves pilotes".
On pourrait trouver des témoignages du même genre pour de nombreuses autres disciplines, et nous en attendons de nos lecteurs!
Terminons par cette cinglante plaisanterie attribuée à Bernard Shaw:
"Ce qu'on sait bien faire, on le pratique, et ce qu'on ne sait pas faire... on l'enseigne!"
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- Enregistré le :jeu. nov. 24, 2005 12:58 am
c'est un peu cinglant cette dernière citation, le savoir faire partager dépend de la passion, de la maîtrise dans le domaine et du vouloir faire partager, non?
L'humilité et la simplicité sont rares comme qualités mais il faut y croire et savoir la dénicher chez chacun; sinon on passe à quelqu'un d'autre, c'est tout.
La musique me semble être quelque chose de très intime, qui touche nos sens les plus profonds; alors il semble que l'on ne perçoit pas la rigueur ou le dogme avec la même échelle de valeur ou perception personnelle.
En Histoire, en Sciences, ou dans d'autres domaines, chaque spécialiste réputé peut-être contredit, alors quand on touche à l'affect perso, c'est encore plus compliqué!
Le débat lancé était "enseigner n'est pas jouer"; j'ai peur de m'égarer maintenant si le sujet s'étire vers d'autres domaines, je souhaite personnellement rester humble.
La musique est pour moi un vecteur d'échange culturel
L'humilité et la simplicité sont rares comme qualités mais il faut y croire et savoir la dénicher chez chacun; sinon on passe à quelqu'un d'autre, c'est tout.
La musique me semble être quelque chose de très intime, qui touche nos sens les plus profonds; alors il semble que l'on ne perçoit pas la rigueur ou le dogme avec la même échelle de valeur ou perception personnelle.
En Histoire, en Sciences, ou dans d'autres domaines, chaque spécialiste réputé peut-être contredit, alors quand on touche à l'affect perso, c'est encore plus compliqué!
Le débat lancé était "enseigner n'est pas jouer"; j'ai peur de m'égarer maintenant si le sujet s'étire vers d'autres domaines, je souhaite personnellement rester humble.
La musique est pour moi un vecteur d'échange culturel
- Pierre LAGOUTTE
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ENSEIGNER N'EST PAS JOUER (Suite et peut-être fin)
Revenons à la Musique...
- Extrait d'un numéro du "Monde de la Musique" de février 1990: Le titre de l'interview de Michel Schneider, qui était alors directeur de la musique et de la danse, est précisément, en lettres de deux centimètres de haut: ENSEIGNER N'EST PAS JOUER. Je ne citerai que l'introduction: "Rue de Madrid, les locaux obsolètes cachaient une machine à produire des solistes. La Villette choisira-t-elle de poursuivre l'abattage ou de jouer un nouveau projet pédagogique ? "
Nous connaissons cet heureux changement et le magnifique développement de la Villette au sein de la Cité de la Musique.
Citons cependant encore des témoignages éloquants:
- De madame le docteur F. Hellebrandt, Directrice d'un laboratoire de biomécanique aux U.S.A. et violoniste amateur: "Le biomécanicien qui est violoniste amateur en sait plus sur le violon qu'un violoniste professionnel".
Difficile à faire admettre par les instrumentistes de grand talent personnel.
- Et encore un article du"Monde de la Musique" datant, il est vrai de quelques années: Le titre est "Les conservatoires ont formé des générations d'éclopés", et, dans le cours du texte ce titre de paragraphe: "La morphologie, une inconnue à l'école ... l'anatomie-physiologie au service du geste musical reste encore un tabou, une zone inexplorée". On notera cependant avec plaisir que le CNSMD de Paris obtient certains récultats grâce aux interventions de Philippe Chamagne, de "Médecine des Arts" et de monsieur Aknin, spécialiste de la maîtrise corporelle.
- Dans sa réponse à mon étude, Jérémy a écrit si justement: "Un débutant a besoin d'un excellent pédagogue". Il est particulièrement difficile d'enseigner aux débutants. Trop souvent, dans les écoles de musique, on confie les classes de débutants à de jeunes médaillés qui viennent de terminer leurs études personnelles. Là est l'erreur, et bonjour les dégâts. Je publierai bientôt une étude que j'ai faite sur les aptitudes pédagogiques exigées des professeurs pour débutants.
Je veux bien admettre que certains des documents que je cite datent un peu. Je terminerai donc par un extrait d'un ouvrage très récent. Il s'agit de "Pathologie professionnelle des musiciens", du professeur Raoul Tubiana (mars 2002). A noter que le professeur Tubiana m'a dédié un exemplaire de son ouvrage en remerciement des documents que je lui avais procurés par mon expérience sur le terrain. On pourra donc lire, dans l'ouvrage cité, en page titre, ce sous-titre " Ce livre a été écrit avec l'espoir que les sujets traités soient un jour enseignés dans les écoles de musique", et page 19: "Les professeurs de musique , en particulier, doivent connaître le fonctionnement des muscles mis en jeu, ainsi que les postures et la gestuelle normales, afin d'éviter et de corriger les attitudes et les mouvements non physiologiques. Il faut déplorer que ces sujets, si importants pour respecter l'équilibre physiologique des mouvements, et permettre la prévention de nombreux troubles chez les instrumentistes soient encore si peu enseignés dans les conservatoires". (Fin de citation)... et fin de mon étude.
P.S. En juillet 1994 a eu lieu à Lyon un workshop international. J'y ai assisté et j'ai rencontré Janos Starker, Christopher Bunting (décédé en juillet dernier) et Phyllis Young (auteur de"Playing the String Game", que j'ai traduit en français pour le plaisir de quelques amis .musiciens). Avec l'autorisation de Starker, j'ai filmé intégralement sa master-class. Je conserve précieusement la cassette video car elle montre un excellent exemple de la transmission d'un savoir gestuel. J'invite les violoncellistes intéressés, professeurs ou élèves... ou amateurs, à venir la visionner chez moi, à Mâcon. (Le TGV s'arrête presque à ma porte). J'espère vos visites.
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- Pierre LAGOUTTE
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Violoncelle... et bricolage!
Je reprendrai une phrase de Noctambule dans sa réponse du 11 décembre dernier "des professeurs qui n'ont pas eu la possibilité ou le temps pour s'ouvrir l'esprit vers d'autres matières"
L'esprit ou la main. Lorsque je rencontre un violoncelliste de talent, même un concertiste, je lui pose la question : "Avez-vous une activité manuelle en dehors du violoncelle ? " Le plus souvent, la réponse est non, pour des raisons de sécurité. Les mains sont précieuses, et elles sont assurées avec interdiction de pratiquer bricolage et activités sportives.
Dommage car l'utilisation d'outils divers permet aux gestes du violoncelliste, préhension et conduite de l'archet, et placements de la main gauche sur les cordes, de se perfectionner, et de se corriger, les uns par les autres. Il est très éducatif de visser ou dévisser des vis, grosses ou petites: petites avec un petit tournevis qui sollicite surtout des mouvements de la main, grosses vis, plus résistantes, qui "recrutent" les muscles de l'avant-bras, de l'épaule, du tronc entier, et même du membre latéral. Même la cueillette des cerises sollicite une très grande diversité de formes et d'utilisation de la main. Personnellement, outre les activités ci-dessus, je fais beaucoup de mécanique automobile, sur mes voitures, même le remplacement d'un moteur ou d'un embrayage! J'utilise ainsi de nombreux outils car on doit souvent chercher la clé qui convient parmi plusieurs séries. Les gestes de tenue, de placement et de rotation de ces clés sont d'une extrême complexité et souvent très difficiles: paume et intervention de chaque doigt. Il faut parfois dévisser ou écrou avec un index de chaque main, coordination ténue entre les deux mains !
Ceci me rappelle une conversation que j'ai eue, il y a quelques années, avec monsieur Jean Deplace, qui a été le prestigieux professeur de violoncelle du C.N.S.M. de Lyon. Il m'avait permis d'assister à l'un de ses cours et, à la fin, il m'a dit ceci: "Mon père est garagiste et l'archet du violoncelle ne peut être comparé à aucun des outils du mécanicien auto: clés, tournevis, marteaux, pinces à cause de la prise en main, des longueurs etc". J'ai répondu: "Il existe un outil qui peut se rapprocher au moins un peu de l'archet du violoncelle: c'est cette longue tige armée d'un aimant ou de pinces, qui permet d'aller récupérer, au fond d'un moteur ou d'un chassis, une vis qui y est tombée.
Cette réponse par plaisanterie, il est vrai".
La manipulation d'outils ou d'instruments variés permet d'arriver au geste le plus précis, le plus efficace et le plus harmonieux et le plus économique en énergie. On satisfait ainsi le fameux "principe d'Ockham". Mais qui connaît le principe d'Ockham ? Il y a longtemps que je promets une bouteille de champagne à celui qui donnera une réponse circonstanciée à cette question !
- JBap
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Le rasoir d'Ockham (ou d'Occam) est un principe de raisonnement que l'on attribue au moine franciscain et philosophe Guillaume d'Ockham, mais qui était connu et formulé avant lui.
Énoncé au XVe siècle, ce principe dit : « Les choses essentielles ne doivent pas être multipliées sans nécessité » (version originale en latin : « pluralitas non est ponenda sine necessitate »).
C'est un des principes fondamentaux de la science.
Aussi appelé « principe de simplicité », « principe de parcimonie », ou encore « principe d'économie », il exclut la multiplication des raisons et des démonstrations à l'intérieur d'une construction logique. Le principe du rasoir d'Ockham consiste à utiliser à fond les hypothèses qu'on fait déjà, avant d'introduire de nouvelles hypothèses, ou autrement dit à ne pas apporter aux problèmes une réponse spécifique, ad hoc, avant d'être (pratiquement) certain que c'est indispensable (sinon on risque d'escamoter le problème, et de passer à côté d'un théorème ou d'une loi physique).
On traduit souvent ce principe sous la forme d'une préférence pour l'hypothèse la plus simple parmi toutes celles qui sont échafaudées, mais ce n'est pas tout-à-fait exact. L'hypothèse d'un monde divin décidant des mouvements célestes sans autre loi que sa volonté inconnaissable, est certainement plus "simple" que la théorie de la gravitation, et beaucoup plus simple que la théorie de la relativité générale. De même, on peut s'engager dans un débat essentiellement terminologique sur la simplicité relative, selon le contexte, d'une hypothèse par rapport à une autre.
Mais ce n'est pas (seulement) la simplicité d'une hypothèse qui compte, c'est, étant donné un ensemble donné de conclusions, la simplicité (faible complexité) de l'ensemble des hypothèses faites pour aboutir à ces conclusions. Un bon exemple d'application correcte de ce principe est la recherche (vaine mais fructueuse) de la déduction du 5e axiome d'Euclide à partir des 4 premiers. De ce point de vue, l'hypothèse d'un contrôle divin permanent sur les mouvements célestes, est très simple, certes, mais elle ne permet aucune conclusion (les choses seront ce qu'elles seront, point final). De même, on peut discuter de la simplicité de la théorie des univers multiples d'Hugh Everett, mais il demeure qu'elle évacue complétement le problème du choix de l'état quantique qui va être observé, et qu'elle ne permet à cet égard absolument aucune conclusion puisque le problème disparait purement et simplement.
Insistons encore sur l'importance des conclusions. Par exemple, pour la plupart des besoins ordinaires de la mécanique, la théorie newtownienne aboutit aux mêmes conclusions que la théorie de la relativité, et elle est manifestement plus simple. Il est donc légitime de la préférer. De même, la conception géocentrique du monde peut être, pour certains problèmes, bien suffisante, et plus « simple » que la conception héliocentrique.
Conan Doyle a souvent mis en pratique ce principe dans les déductions de Sherlock Holmes.
Alors, ma bouteille ??
Énoncé au XVe siècle, ce principe dit : « Les choses essentielles ne doivent pas être multipliées sans nécessité » (version originale en latin : « pluralitas non est ponenda sine necessitate »).
C'est un des principes fondamentaux de la science.
Aussi appelé « principe de simplicité », « principe de parcimonie », ou encore « principe d'économie », il exclut la multiplication des raisons et des démonstrations à l'intérieur d'une construction logique. Le principe du rasoir d'Ockham consiste à utiliser à fond les hypothèses qu'on fait déjà, avant d'introduire de nouvelles hypothèses, ou autrement dit à ne pas apporter aux problèmes une réponse spécifique, ad hoc, avant d'être (pratiquement) certain que c'est indispensable (sinon on risque d'escamoter le problème, et de passer à côté d'un théorème ou d'une loi physique).
On traduit souvent ce principe sous la forme d'une préférence pour l'hypothèse la plus simple parmi toutes celles qui sont échafaudées, mais ce n'est pas tout-à-fait exact. L'hypothèse d'un monde divin décidant des mouvements célestes sans autre loi que sa volonté inconnaissable, est certainement plus "simple" que la théorie de la gravitation, et beaucoup plus simple que la théorie de la relativité générale. De même, on peut s'engager dans un débat essentiellement terminologique sur la simplicité relative, selon le contexte, d'une hypothèse par rapport à une autre.
Mais ce n'est pas (seulement) la simplicité d'une hypothèse qui compte, c'est, étant donné un ensemble donné de conclusions, la simplicité (faible complexité) de l'ensemble des hypothèses faites pour aboutir à ces conclusions. Un bon exemple d'application correcte de ce principe est la recherche (vaine mais fructueuse) de la déduction du 5e axiome d'Euclide à partir des 4 premiers. De ce point de vue, l'hypothèse d'un contrôle divin permanent sur les mouvements célestes, est très simple, certes, mais elle ne permet aucune conclusion (les choses seront ce qu'elles seront, point final). De même, on peut discuter de la simplicité de la théorie des univers multiples d'Hugh Everett, mais il demeure qu'elle évacue complétement le problème du choix de l'état quantique qui va être observé, et qu'elle ne permet à cet égard absolument aucune conclusion puisque le problème disparait purement et simplement.
Insistons encore sur l'importance des conclusions. Par exemple, pour la plupart des besoins ordinaires de la mécanique, la théorie newtownienne aboutit aux mêmes conclusions que la théorie de la relativité, et elle est manifestement plus simple. Il est donc légitime de la préférer. De même, la conception géocentrique du monde peut être, pour certains problèmes, bien suffisante, et plus « simple » que la conception héliocentrique.
Conan Doyle a souvent mis en pratique ce principe dans les déductions de Sherlock Holmes.
Alors, ma bouteille ??

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